Long Time no see

17 juin 2010

Ça faisait longtemps que je n’étais pas venu par ici. Alors quoi de neuf ? De neuf par rapport à ce qui ne l’est pas, à ce qui n’est que répétition d’actions, d’activité, trajets répétés. Je suis allé à Cannes, au festival, c’était bien , j’y ai vu beaucoup de films, quelques très mauvais, quelques très bons.  J’ai bien aimé n’être là bas que dans une perspective cinéphile sans avoir de projet professionnel à défendre. Je n’avais pas cette espèce de sentiment de culpabilité que me tiraille en permanence entre la volonté de profiter de mon temps libre librement et celui de le mettre à profit pour travailler ma carrière de réalisateur. Là je n’avais rien réalisé, rien à vendre, à défendre. J’étais juste là en tant que oisif cinéphile venu voir un panorama de ce qu’est le cinéma mondial aujourd’hui. Et de ce point de vue là ce fut un grande réussite.

La chose qui fut plus délicate a été devoir attendre entre plusieurs séances. En effet n’ayant qu’une accréditation presse pour la Quinzaine des Réalisateurs (d’ailleurs merci encore Benoît), je ne pouvais voir que les films de cette sélection plus certains films de la compétition officielle si j’arrivais à récupérer des billets devant le palais des festivals. Or il m’est arrivé, par une mauvaise organisation et surtout par manque de réussite devant le palais d’avoir soudain un boulevard de trois heures devant moi avant le film suivant. Sachant que je logeais au camping, il m’était inutile de rentrer puisque j’en avais déjà quasiment pour une heure de trajet. Il m’a donc fallu attendre. Trois heures. Seul. Je connaissais bien des gens sur le festival mais le décalage des projos etc… personne n’était jamais dispo à ces heures là. Mon festival de Cannes se transformait alors en une espèce d’errance sans fin sur la Croisette.Errance pensive me laissant à loisir réfléchir aux oeuvres que je venais de voir. J’ai finalement réalisé que c’était très rare que je prenne autant le temps de penser ce que je vois. Là j’ai pu tourner et retourner dans tout les sens les objets qu’on me proposait. Mais ces trois heures, très vites, devinrent un espèce de calvaire horrible où mon désoeuvrement atteignait des proportions ridicules. Je m’asseyais sur un banc et regardait passer les gens. Toutes ces nationalités différentes, bien engoncées dans leurs smokings ou robes de soirée, tout ces professionnels du cinéma dont je me demandais si un jour je finirais par faire partie. Et tout passait lentement. J’évitais, comme je le faisais quand je travaillais à l’usine, de regarder ma montre sachant que je serai déçu par l’heure, je me fixais des objectifs, de marcher jusqu’à tel endroit, d’attendre encore un peu, repoussant au maximum la prise de conscience du temps qui restait à attendre. Étonnamment je ne lisais pas, alors que que je suis un lecteur plutôt assidu, j’aurais pu facilement finir un roman ou deux durant ces périodes d’ennui forcé mais paradoxalement l’ennui entraînant aussi une démotivation qui ne me laissait pas faire le simple effort de plonger dans un roman. Je lisais bien quand même les revues que l’on trouve quotidiennement à Cannes, rendant compte de tout les contrats en signature, les nouveaux accords et partenariats trouvés lors du festival, ainsi que des critiques sommaires des films projetés. Mais ça ne parvenait pas à rendre ce temps divertissant. Alors j’attendais, au sens premier du terme, quelque chose que je ne fais jamais au quotidien, j’ai l’impression. Là j’étais véritablement dans un état d’attentisme absolu, d’espèce de vide intersidéral. J’ai même squatté pendant quelques minutes les barrières devant le Hilton pour voir les stars monter et sortir de voitures de luxe. Non pas que j’ai envie de voir qui que ce soit de connu mais simplement que cela représentait un début d’activité me permettant, en étant ambitieux, de tuer une demi-heure. C’était d’ailleurs assez fascinant de voir tout les gens agglutinés pour voir leurs célébrités préférés, à 100 mètres plus loin et finalement conclure par un « c’est des gens comme les autres, c’est pas parce qu’ils ont de l’argent qu’ils sont spéciaux »… Je restais là un moment à observer ce ballet incessant de voitures, de gens qui en sortent et qui y rentrent. Des gens qui n’ont pas attendre trois heures entre deux projections de films…

Au final, je finissais par en voir le bout et me trouvais récompensé d’être là assis face à l’écran prêt à découvrir, le plus souvent, un film dont j’ignorais tout. Et ça valait la peine d’être là. La passion était toujours présente, rien ne pouvait vraiment l’émousser.

Sinon j’ai commencé la rédaction d’un nouveau scénario, dirons-nous, autobiographique qui avance assez vite. Je ne sais pas où ça va me mener mais bon, c’est déjà quelque chose.

Après Antichrist  de Lars Von Trier, je viens d’apprendre ce matin qu’Hollywood projette de faire un film sur une idée que j’avais eu il y a quelques temps et qui me tenait vraiment à coeur. Si j’attends encore quelques années je pense que les quelques idées originales que j’ai pu avoir vont être trouvées par d’autres… C’est rageant, d’autant que j’ai toujours la prétentieuse impression que je ferais largement mieux que ce qu’ils font de l’idée de base.

Superbe chanson, je me rends compte que j’aime de plus en plus ce genre de musique très simple, minimaliste mais qui me touche énormément par sa simple mélancolie mélodique :

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My day stands still

28 avril 2010

Plus rien ne bouge. Plus rien ne semble bouger. Alors que je regarde au loin devant moi pas un souffle ne fait frémir l’air que je respire. J’ai beau essayer de voir le plus loin possible, de me mettre sur la pointe des pieds pour discerner les formes les plus éloignées de ma position je n’aperçois rien qui ait l’apparence ou la texture d’un mouvement potentiel. Je sais pourtant qu’il ne tient qu’à moi d’actionner mes membres, de délier mes muscles pour avancer mais je me sens bloqué, emprisonné et je ne parviens pas à faire interagir ma volonté et mon corps. La communication est visiblement coupée entre l’un et l’autre et il me manque une pièce pour les reconnecter. Et c’est dans cette pièce de mécanique interne que réside toute ma problématique. Sans elle je suis condamné à rester immobile, épouvantail pathétique. Avec elle je suis capable de me mettre en branle et d’aller vers l’avant. Vers je ne sais quoi mais avancer vaut toujours mieux que rester cloitré dans sa propre coquille qui chaque jour gagne une couche de poussière qui se cristallise instantanément rendant le mouvement de plus en plus difficile.

Et j’ai le sentiment que la recherche de cette pièce « manquante » devient malgré moi, la quête existentielle de ma vie. Elle est l’objet de convoitise de la lutte quotidienne et titanesque qui se joue en moi. Elle est la clef qui permettrait d’ouvrir certaines vannes et d’en fermer d’autres. Elle est le rouage manquant de ce mécanisme imparfait et insatisfaisant qui est « moi ».

C’est assez paradoxal cette conscience permanente des choses et cette incapacité à les guérir. Mais avoir conscience ce n’est pas avoir de traitement. Ce n’est pas parce que l’on est conscient des symptômes d’une maladie que l’on est nécessairement capable de la soigner. Cela permet d’en connaître la teneur, la localisation, la gravité mais ce n’est certes pas suffisant pour en trouver le remède immédiat et définitif. Donc voilà où je me situe. J’ai connaissance des choses qui ne vont pas dans mon comportement et qui m’empêche d’atteindre mon objectif (faire des films). Maintenant il me reste à trouver le remède à cette affliction, ce handicap que je m’inflige à moi-même. Une partie de ce remède est extérieure à moi bien évidemment mais une autre est mon entière responsabilité. Et c’est sur celle là qu’il me faut me pencher. Et vite.

 

Temps passé, perdu, incoercible.

10 mars 2010

L’autre jour en faisant la poussière j’ai découvert une feuille contenant mes horaires de travail du mois de décembre dernier. Rien d’extraordinaire à cela si ce n’est que cela m’a plongé dans une drôle de réflexion. Sur la page devant mes yeux les horaires d’une semaines que j’avais déjà vécu. L’organisation d’un temps qui m’avait été imposé et auquel je m’étais plié et selon lequel j’avais organisé ma vie hors du travail. Moi qui vit dans une temporalité perpétuellement nostalgique j’ai essayé de me souvenir de cette semaine là. En regardant ces horaires, leur immuable fixité, leur numération dogmatique, je pensais pouvoir retrouver un moment de vie, un instant, un sentiment ou une sensation. Mais après plusieurs efforts mentaux et recoupements de dates clés, je ne pus vraisemblablement me souvenir de quoi que ce soit. J’ai vécu cette semaine là, elle existe dans l’immatériel registre de ma vie mais elle a perdu toute réalité événementielle. Elle s’est dissoute dans le magma protéiforme de la mémoire. Elle n’est plus singulière d’un développement chronologique s’incarnant dans un instant T entre un avant et un après. Peut-être me souviendrais-je d’être allé dans ce restaurant ou d’avoir eu cette discussion particulière avec untel mais ce ne sera pas inhérent au moment. L’événement en tant que tel se détache totalement de son appartenance temporel pour représenter une vignette, un plan de la vie. Similairement, la culture que j’ai absorbé cette semaine là, je m’en souviens. Mais elle est profondément détaché de son médium d’absorption. J’ai découvert quelques films, vu quelques épisodes d’une série télévisée, lu quelques centaines de pages mais l’action physique qui a conduit à intégrer ces informations n’a plus aucune valeur, aucune incidence sur l’information elle-même. Je perçois le caractère absolument vain de cette réflexion, sa lapalissade complexion mais néanmoins elle m’a frappé soudainement comme une vérité jusqu’à alors dissimulé au cours de mon existence et pourtant régissant sa constitution même. Alors cela est probablement le signe d’une vie trop simple, trop engoncée dans une répétition de gestes similaires et de trajets identiques. Le quotidien finit par se dissoudre dans un temps atemporel d’où il est de plus en plus difficile d’en extraire la singularité, la spécificité propre. 

Il m’est arrivé déjà par le passé d’avoir ressenti quelque chose de semblable. Il y a 5 ans j’avais travaillé pendant trois mois dans une usine de préparation de commandes en produits frais. Le travail était agréable et très dynamique, je me souviens avoir pris du plaisir à effectuer cette tâche pourtant ingrate. Cependant, quand plusieurs années plus tard j’ai voulu repenser ce moment précis, je fus incapable de me souvenir de ce que j’avais fais durant ces trois mois. Je terminais mon travail tout les jours à 14h et pourtant toutes ces après-midi où j’avais été livré à moi-même m’ont totalement échappé. Dans le fantasme de mon souvenir, j’ai oisivement profité de ce temps libre pour voir des films, lire et profiter de la ville, mais je suis incapable de me visualiser véritablement durant ces trois mois. Paradoxalement, je garde un souvenir net de détails sans importance : avoir eu un gros bouton sur le nez qui m’a embarrassé plusieurs jours, avoir rencontré un professeur au supermarché, avoir, un soir, tourné 45 minutes en voiture sans trouver de places pour me garer, avoir passé une nuit blanche d’insomnie lors de laquelle j’ai lu un mauvais roman de Lucia Etxebarria etc… Mais tout ces micros-évènements ne sont pas effectifs et ne parviennent pas à tisser la toile globale d’une période entière. Je ne désire pas me souvenir de chaque instant, ça n’aurait d’ailleurs aucun intérêt mais je ne souhaite pas non plus perdre dans le néant, ce temps laissé derrière moi et qui semble faner et se décomposer à mesure que j’avance. Je pense simplement que la peur de la léthargie quotidienne d’une vie sans éclat, dissoute comme je le disais plus haut dans l’atemporalité de l’existence préside à cette inquiétude qui s’est emparé de moi alors que je tenais dans ma main ce tableau absurde comportant mes horaires de travail. Je ne sais comment contourner cet indubitable risque et ce confort aveugle. Je suis dans une période, un temps justement où je passe d’un état à un autre, ou les choses semblent devoir se cristalliser selon un schéma quasi définitif. Cette installation là m’effraie et je continue de remuer tout mes membres pour éviter de sécher dans une position monumentale irrémédiable et asphyxiante.

Incidemment, j’ai découvert hier soir, le film d’Alain Resnais, Je t’aime, je t’aime qui traite justement de la mémoire et de notre regard sur notre propre histoire. Film passionnant et magnifique, il contient je crois la problématique que je développe plus haut. Sous couvert d’un postulat de science-fiction, il nous propose l’assimilation voyage dans le temps et voyage dans la mémoire. Et c’est là la beauté de cette idée, que le voyage dans le temps n’est rien d’autre qu’un voyage dans la mémoire puisque le temps passé est perdu à jamais. Triste mais beau et terriblement vrai.

 

 

Fascination

18 février 2010

Je viens de découvrir ce site de bande-dessinée interactive et je suis assez bluffé : http://www.prisedetete.net/

C’est étonnant comme on peut être créatif avec aussi peu de choses. Des formes simples, idéogrammatiques, à peine dessinées si je puis dire mais organisées d’une telle manière que leur lecture en est perpétuellement ludique. Car l’auteur utilise adapte son travail au média qu’il explore. Ainsi il parvient à donner un sens à la bande-dessinée interactive. Ce n’est pas simplement une dénomination basiquement plaquée sur un concept mais une vraie concordance effective entre l’art de la bande-dessinée et l’interactivité du lecteur face à son ordinateur. Et en outre de la qualité intrinsèque de l’oeuvre proposée sa cohérence structurelle constitutive suffit à la rendre fondamentalement intéressante. Car son auteur a parfaitement conscience des deux pendants de son travail, celui de bande-dessinée et celui de son adaptation au média Internet. Et cette réflexion qui m’a frappé en découvrant cela doit se transvaser vers la théorie créative cinématographique et rencontrer des problématiques qui me sont plus directement propres. En effet, je découvre beaucoup de films récemment qui n’ont pas conscience de leur spécificité d’oeuvre de cinéma, qui ne réfléchissent pas leur matière comme une matière cinématographique mais plutôt comme une simple étoffe narrative uniquement nécessaire à recouvrir le squelette du scénario. Alors cela crée des films parfois réussis dans leur volonté didactique de raconter quelque chose, il ne faut pas le nier. On peut apprécier trivialement une bonne histoire, aimer en connaître les tenants et les aboutissants en se convaincant de feigner la surprise mais on peut également décider de ne pas être rassasié de cette procession de corps narratifs vides se déplaçant en formation sérrée la tête penchée vers le sol dans une démarche de somnambule s’engouffrant dans un tombeau dont ils ne ressortiront jamais. On peut décider de remonter cette longue marche funèbre pour essayer d’en trouver la source, le coeur duquel il sera permis d’explorer d’autres routes, d’autres possibilités.

 

C’est ce qui fait le plus défaut au cinéma contemporain. Ce manque de tentatives, avortées ou non peu importe après tout. J’ai l’humble conviction que c’est ce que j’essaie de faire avec mes petits films. Essayer d’adapter mon propos à mon médium. En partant tout simplement toujours du ressenti cinéma. C’est mon processus créateur. Je ferme les yeux et imagine ce qui pourrait représenter un plan fort, un enchaînement émouvant, un mouvement de caméra évocateur et signifiant, une scène ambivalente, une illustration sonore qui prend aux tripes etc… Et c’est à partir de là, de ces micros morceaux de films fantasmés que je commence à composer le reste, à lier entre eux les différents moments que j’ai imaginé. Je ne sais pas si c’est une bonne méthode de travail, je ne la préconise pas nécessairement mais je met simplement le doigt sur le fait qu’elle est adaptée à tout point de vue au médium cinéma. Qu’elle part de la source même de ce qui le constitue pour s’en éloigner et mieux y revenir. Je dis ça sans prétention aucune, sans ostentation mais j’ai le sentiment que bon nombre d’auteurs ont la démarche inverse et leurs films en sont la plus pure démonstration. Un processus qui part orbitalement du cinéma pour y tourner autour et n’y revenir qu’incidemment presque par accident, par oubli, par hasard.

J’aimerais voir plus de films ayant la capacité de réinventer leur propre système en permanence. Ce sont les films que j’aimerais voir plus souvent. Des oeuvres capables de déclencher de vrais élans passionnés sans retenus ni modération ce qui ne m’est pas arrivé depuis longtemps (à part pour le dernier Peter Jackson dont j’ai haï absolument chaque parcelle, chaque seconde – mais je ne peux lui reprocher d’avoir voulu tenter de faire un film assez original dans sa forme).

Deuxième petit dessin de Mathieu M. :

Fascination hom2.th

Strip d’un pote !

19 janvier 2010

Voilà, il est sans doute trop fainéant pour se créer un blog alors il me propose de poster son strip sur le mien. J’ai rien contre. Voilà c’est de monsieur Mathieu M. et c’est pas mal. Un bon début.

Strip d'un pote !  img22r

2010

12 janvier 2010

Premier article de l’année pour vous souhaiter (genre il y a des gens qui lisent) une bonne année à toutes et à tous. La santé d’abord que l’on fait toujours passer en premier parce qu’effectivement sans santé il ne peut y avoir le reste, de la réussite dans tout vos projets quels qu’ils soient professionnels ou personnels et plus globalement un bonheur de vivre quotidien et inaltérable. Ne pas se laisser manger par la vie active et toujours valoriser le temps présent comme un temps unique et en extraire le meilleur en permanence. Ceci est inconsciemment (ben non puisque je l’écris) un conseil que je veux m’appliquer à moi même en priorité. Ce n’est pas facile et cela induit de définir ce que veut dire « valoriser le temps présent ». Etre face à cet ordinateur en train d’écrire ce texte est-ce de la valorisation ? Ou de la perte ? Personne ne peut l’affirmer. De même que passer une heure à regarder des conneries sur Internet ne semble pas à proprement parler de la valorisation de quoi que ce soit. Cependant je pense qu’il faut regarder cela à l’aune du plaisir procuré par une telle activité. Enfin bref, il s’agit de savoir définir ce qui est bon pour soi et ce qui serait meilleur. Voilà, la conclusion de cette lapalissade verbale inutile :  sachez ce qui est le meilleur pour vous et allez toujours dans cette direction quitte à faire des sacrifices. Car sur le long terme c’est cela qui sera toujours le plus gratifiant.

D’ailleurs cette locution « long terme » devient de plus en plus importante à mes yeux. Je la confronte en permanence au « court-terme » du quotidien. Ma situation actuelle est satisfaisante (un travail alimentaire certes mais agréable et pas prise de tête, un appart décent, une copine géniale, la santé etc…) au quotidien mais apparaît plus que précaire sur le long-terme. Si je continue ainsi je serais contraint à n’envisager l’avenir que sur une très courte durée. Il me faut voir plus loin, plus haut aussi. Lancer mon regard horizontalement et verticalement plus loin pour essayer d’assurer le reste. De plus en plus je suis surpris et frustré de voir des gens jeunes avoir une réussite professionnelle incroyable. Tel mec, vu à la télé qui, à 28 ans, peut déjà se payer un appartement de 650 000 €. Quand j’aurais 28 ans, je serais probablement toujours assis sur cette même chaise, face à ce même écran (s’il ne me lâche pas avant, il montre des signes de faiblesses) et je n’aurai certainement 650 000 € pour acheter un appartement. Bon tout est question de business, de branches, de plan de carrière. Mon but n’est pas de gagner de l’argent. Mais j’ai l’impression parfois que, déjà, j’ai un retard énorme sur ma génération. Putain d’esprit de compétition.

Enfin bref, dans moins de deux semaines, je soufflerais 27 bougies. C’est assez éprouvant. Je m’éloigne de 20 et m’approche de 30. Je peux commencer à dire « quand j’avais 20 ans ». Il y a dix ans, j’avais 17 ans et je n’étais pas sérieux. J’étais un grand romantique qui écrivait des poèmes et avait des rêves plein la tête. Je ne peux pas dire que je me sois déçu pour le moment où que je me sois renié. J’ai toujours poursuivi ce que je voulais. Mais j’ai la sensation d’avoir perdu l’esprit que j’avais à l’époque. Cette inébranlable foi en moi. En ce que j’avais à l’intérieur. Ce n’était pas quelque chose d’ostentatoire ou de présomptueux. Seulement le sentiment d’être légitime en tant qu’être humain au sein du monde. C’est probablement un sentiment propre à l’adolescence où se cristallise énormement de choses et où l’on acquiert une vraie specificité au sein de la société. En tout cas je l’ai vécu très fort et aujourd’hui je sens que je fais le chemin inverse. Que peu à peu je recommence à me fondre dans la masse indistincte de la vie active. Et alors que c’était naturel quand j’avais 17 ans, je dois me battre, assez durement d’ailleurs, pour garder la tête au dessus de tout ça.

J’ai toujours dit que nous partagions tous une nostalgie innée de l’enfance qui nous suit toute notre existence. Gin n’est absolument pas d’accord avec moi et, au contraire, s’affranchit totalement de ce qu’elle était quand elle était plus jeune. Il appartient à chacun de jeter un regard particulier sur son enfance/adolescence. Ou pas. Peut-être qu’il faut se contenter d’avancer et ne pas regarder derrière. Valoriser le temps présent ne peut s’accomplir tant que chaque instant se construit comme un bilan par rapport à un temps révolu. Je suis ce que je suis maintenant et c’est tout.

Beaucoup de babillages inutile mais ce ne sont que l’expression de pensées qui affluent en moi dernièrement. Je pense toujours être un peu perdu entre ce que je veux être et ce que je suis n’arrivant pas à concilier harmonieusement les deux. J’ai cette passion artistique pour le cinéma et de plus en plus je la vis comme une malédiction tellement je construis ma vie autour d’elle et de son potentiel echec. Ma malédiction et ma porte de sortie. Comme un super-pouvoir.

Plus prosaïquement, mon année 2010 sera celle où je fais un nouveau film (peu importe quoi, un documentaire sur mes orteils s’il le faut), où je me fais un nouveau tatouage (je sais quoi et où mais il faut que Gin me fasse le design), où je change de boulot (il faut que je me force, j’ai l’impression que ce magasin est de plus en plus comme ma chambre et je pourrais aisément m’y endormir et me réveiller à la retraite en regrettant de ne pas avoir mis de réveil) et où j’essaie d’être plus équilibré qu’en 2009.

Un petit conseil ciné avant de nous quitter : Une Vie Toute Neuve. Magnifique film coréén (produit et co-écrit par Lee Chan-Dong) sur une petite fille triste dans un orphelinat. C’est simple mais infiniment touchant. J’ai pleuré presque du début à la fin. Je conseille très, très chaudement.

Etat grippal

17 décembre 2009

Cela fait presque un  mois que je n’ai pas écrit ici. Ce n’est pas un manque d’envie mais simplement un assèchement de mon inspiration. J’ai cette désagréable impression de n’avoir rien à raconter. Je ne peux pourtant pas dire que ma vie soit particulièrement routinière  et que, par cet état de fait, rien de nouveau ne vient troubler mon quotidien mais je me rends compte, tout simplement, que par mon obsession au sujet particulier du cinéma il n’y a rien de nouveau à en dire, si ce n’est s’en plaindre et me lamenter sur mon improductivité forcée. Et je ne veux pas venir ici et décrire toujours les mêmes sentiments. Cette perpétuelle peur de l’échec entrecoupée d’envolées lyriques me rassurant moi-même sur ma volonté individuelle de parvenir à mes fins. Je pense tourner en rond dans cette dialectique qui s’inscrit dans un cercle vicieux duquel je ne vois aucune issue. Donc qu’écrire ? De quoi parler ? Je veux parler de cinéma, du cinéma que je veux faire et de celui qui me tient à coeur. Mais je ne veux pas m’appesantir sur ce que je vois parce que je le fais ailleurs (succinctement il est vrai, il y a déjà assez longtemps que je n’ai pas réalisé un vrai travail critique de fond). Pourtant dernièrement je dois reconnaître un certain bouillonnement culturel autour de moi. Je lis beaucoup, je me suis remis aux romans graphiques, remis aux jeux-vidéos et j’y vois beaucoup de choses très stimulantes. Mais ce n’est pourtant pas de ça dont j’ai envie de parler, ou du moins pas uniquement de ça. Cependant je ne me demande pas la finalité de ce blog, je ne remets pas en doute l’utilité de son existence. Utilité uniquement égocentrique qui a pour but de décrire par écrit certains états d’âme. Un journal intime public, aujourd’hui où nous nous sentons tous importants et différents, où par tous les moyens nous essayons d’exister hors de la masse, de trouver notre singularité, ce chromosome qui nous rend unique et l’exposer à la face du monde dans toute l’impudeur de sa nature.

Voilà où j’en suis, ce soir, un peu grippé, embrumé.

Il neige à Paris c’est très beau. Mais beaucoup de gens dorment dehors et ça, ça n’a rien de beau, rien de féérique et je brûlerais bien tout les sapins de noël du monde pour leur donner un peu de chaleur.

Pour conclure, voilà une magnifique chanson de Benjamin Biolay (artiste que j’apprécie plutôt moyennement par ailleurs) qui correspond bien à mon humeur hivernale mélancolico-dépressive.

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L’heure du bilan

19 novembre 2009

Voila, ça fait un an maintenant que j’habite à Paris, que j’ai opéré ce déménagement que j’espèrais décisif pour moi et que j’avais fantasmé plusieurs années durant. Qu’en est-il aujourd’hui, un an après, positif, négatif, neutre ?
D’un point de vue personnelle, je me suis éclaté. La ville est merveilleuse, je ne m’en lasse pas (je la connais à peine à vrai dire tellement il y a de choses à voir). J’ai bien peur de n’avoir jamais envie de m’en séparer. De plus j’ai pu profiter du cinéma comme j’avais je ne l’avais fait avant. Voir beaucoup de choses différentes et passionnantes auxquelles je n’aurais pu assister auparavant. Il faut que je me bouge plus pour aller voir des expos et des musées (heureusement que Gigi me pousse un peu dans ce sens là) car c’est inépuisable. Et la vie en elle-même a été vraiment super agréable. J’ai profité comme jamais des joies d’être au coeur de la ville durant les 9 mois que j’ai passé à République. Rarement je n’avais senti ce poids de la « cité » tout autour de moi, sa prégnance architecturale et humaine, ses entrelacements secrets, son sein si paradoxalement chaleureux et impitoyable. J’ai tout de suite trouvé un travail. Parmi l’éventail des possibilités de jobs que je puisse trouver celui-là en représentait un peu le Graal. Vendeur DVD dans une grande enseigne idéalement placée (Virgin des Champs-Elysées). Ça me changeait de la préparation de commande à moins 30 et de la pose de parquet, 8 heures par jour à genoux. Et effectivement le travail est très plaisant. Entre les collègues cinéphiles, le rythme de travail on ne peut plus tranquille et les produits qui nous entourent je ne peux pas me plaindre. Je n’ai pas encore le syndrome de me battre tout les jours pour aller au travail. Quand j’enfile mon gilet et me retrouve sur le terrain j’ai parfois l’impression d’être dans ma chambre.

Mais ce n’est pas suffisant. Le gros bémol de cette année a été clairement le cinéma d’un point de vue professionnel. Que ce soit dans la diffusion d’Entre la Lune et le Soleil (diffusé dans un bar, je ne me suis pas assez bougé de ce côté là je le reconnais) ou dans le montage de mon nouveau projet (écrit il y a déjà un an), Le Chevalier Errant sans Monture qui n’a pas avancé d’un pouce, c’est un peu une année perdue. Cela me paraît un peu normal de prendre du temps pour trouver ses marques, pour savoir vers qui s’adresser etc… Mais toujours est-il que je finirais 2009 fortement frustré. D’autant que je n’ai aucune assurance de rebondir en 2010. J’ai parfois l’impression que ça ne tient qu’à moi et l’instant d’après je m’apitoie sur moi-même en maudissant ce foutu système. Je m’étais promis d’aller à Cannes avec un nouveau film à mettre au Short Film Corner mais je dois dire que pour l’instant il n’y a rien de vraiment concret qui puisse remplir le contrat de cette promesse.

Alors je traverse une période de remise en cause personnelle et professionnelle assez profonde. Je me sens parfois un peu perdu dans ma propre tête. Mais ça n’entache pas ma motivation et mon envie d’aller de l’avant, je pense que c’est le plus important. Comme pour beaucoup de mes amis, on vit tous une période charnière de notre vie où pour certains c’est plus facile de s’insérer dans la file qui leur convient et où pour d’autres on tâtonne à l’aveugle sans savoir ce qu’il y a devant. Je préfère cela ceci dit, à un boulot fixe dans lequel je sais que je vais probablement y passer le reste de ma vie active. Il n’y aurait rien de plus triste.

Enfin bref, j’habite à Paris, j’ai un boulot alimentaire sympa qui me prend beaucoup de temps, je commence à donner des cours à un atelier vidéo et je me rends compte que je m’amuse énormément et y trouve beaucoup de plaisir (piste à creuser pour le futur), je suis totalement heureux en couple, j’ai un appart sympa et j’ai des projets de films dont un court-métrage qui me tient très à coeur et auquel je crois beaucoup. Voilà comment je peux résumer ma vie à l’heure d’aujourd’hui. Voilà le bilan qui clôt cette première année dans la capitale.

Rendez-vous dans un an.

Nolife…

3 novembre 2009

Pendant plusieurs mois, j’ai fantasmé sur ma future installation télé écran plat + ps3 + blu-ray où j’allais enfin pouvoir profiter un max de ma cinéphilie à la maison et arrêter de regarder des films, assis sur une chaise en face de mon PC. Et bien ça y est, après avoir dépensé beaucoup (trop) d’argent j’y suis arrivé. Assis sur mon canapé en face de mon 117 cm LED, avec ma PS3 allumée avec un Blu-Ray à l’intérieur. Ce moment là aurait signifié pour moi, il y a quelques années, une montée d’excitation extraordinaire assortie d’une satisfaction totale et fière face à ce que je venais d’accomplir. Mais là quelque chose s’est brisé en moi. L’excitation puérile de l’événement a fini par totalement s’éventer. Assis sur mon canapé face à cet écran immense, je ne me sens pas rempli de joie, je ne suis pas ébloui, ça ne me rend pas momentanément heureux. L’image est belle, la coordination des différents appareils est parfaite et ne me déçoit en rien. Tout fonctionne selon ses attributions. Le seul disfonctionnement à noter est à l’intérieur de ma poitrine. Dans un processus mort-né, un mécanisme qui ne s’est pas déclenché.

Qu’est-ce qui s’est passé ? What went wrong ? Après avoir avalé cette déception personnelle et l’avoir même un peu caché autour de moi par honte, j’ai tenté de comprendre ce qui se passait. Assez rapidement je compris les raisons d’une telle réaction. J’ai grandi. Quand on est enfant et que l’on s’imagine avoir pour Noël tel ou tel jouet, rien ne peut entacher l’excitation qui monte lentement et qui trouve son aboutissement orgasmique à l’ouverture de l’emballage et à la première prise en main de l’objet. Toujours on attend quelque chose. J’ai toute ma vie vécue dans l’impatience de quelque chose qui devait arriver, ne serait-ce que la sortie d’un film au cinéma que j’attends depuis des années. Et bon ou mauvais soit le film, le plaisir de la découverte n’a jamais été déçu, ce fourmillement intérieur, cette joie sourde s’est toujours vue récompensée à sa juste valeur par une vague de chaleur momentanée et agréable. Mais cette fois tout s’est désamorcé et s’est éteint comme ça, insidieusement. Le temps passant, les choses que l’on attend changent de statut. A l’impatience matérielle d’un nouvel objet se substitue le  désir plus profond d’un bonheur plus dilué. A l’impatience de l’instant se substitue l’attente plus sage d’un bonheur quotidien. Aujourd’hui la flamme n’est pas éteinte mais elle ne s’enflamme plus comme avant. Cela peut paraître d’une tristesse infinie mais en réalité cette flamme s’est juste amenuisée et n’est plus sensible au moindre fluctuations du vent mais attend patiemment la tempête, la tornade qui étendra sa langue coruscante alentour, embrasant mon corps en une gerbe instantanée et lumineuse réduisant en cendres le quotidien de ma vie.

Je pense que l’homme est ainsi fait. Qu’il est ontologiquement construit selon une évolution logique dans la hiérarchie de ses attentes. Cela est une évidence même mais il m’a fallu en traverser le processus empirique pour en retirer l’essence. Aujourd’hui je sais que ce qui me rendra heureux ne sera pas l’enchaînement programmé de micros-évènements mais bel et bien l’installation pérenne de quelques blocs inaltérables de vie. Et je sais pertinemment que la réussite professionnelle, en ce qui me concerne, est actuellement ma plus grande inquiétude. J’ai réussi brillamment à trouver l’amour et à m’installer dans une relation osmotique et de ce point de vue là je réalise chaque jour ma chance. Cependant je sens peser sur moi l’ombre de l’échec professionnel et c’est cette obscurité froide qui fait vaciller la flamme, qui la menace de l’éteindre. C’est le jour où je recevrais le premier centime en tant que cinéaste ou que je verrais mon nom sur un écran de cinéma que cette flamme prendra son ampleur maximale et s’étendra en l’incendie qui ravagera les plaines désertiques de mon âme.

Sinon rien à voir mais je termine à peine un roman absolument divin où le génie éclate à chaque page, à chaque ligne où la beauté de la littérature n’a d’égale que la richesse de ce qui est dit. Rarement lu des passages aussi beaux. Beaux dans le sens plein et profond du mot. D’une beauté irréelle et immortelle. J’ai eu l’impression d’avoir lu constamment ployé sous le joug esthétique des mots et des phrases. Un chef d’oeuvre comme on en lit, je pense, très peu dans une vie :

Le Rivage des Syrtes - Julien Gracq

Je ne saurais donc que trop le conseiller. Comme tous les Gracq il est en plus édité chez José Corti, l’éditeur qui vent des livres où il faut couper soi-même les pages, les séparer une à une. Cela donne, en particulier pour ce roman-ci, un charme particulier,  comme la découverte progressive d’un trésor caché. Je rêve d’en faire une adaptation. Ce serait quasiment impossible, le film d’une vie. Il faudrait un doigté, une délicatesse infinis pour pouvoir en venir à bout mais ce serait passionnant. J’ai lu cette année trois ouvrages qui font partie de mon top 10 littéraire de tout les temps : La vie (mode d’emploi) de Pérec ; Vendredi dans les limbes du Pacifique de Tournier et celui là. Année parfaitement réussie de ce côté là donc.

 

Le come back du come back

19 octobre 2009

Enfin j’ai récupéré Internet.Depuis notre déménagement à Asnières, nous n’avions plus Internet à la maison (si ce n’est l’iPhone qui m’a quand même largement sauver la vie – oui car Internet c’est la vie). Suite à une embrouille avec Numéricable j’ai décidé de me tourner vers Free et tout s’est très bien passé jusqu’à ce qu’on me vole ou que le m’on subtilise ma freebox que j’avais fait envoyer à mon boulot. Donc gros bordel pendant trois semaines, j’appelle tout les deux jours et tout les deux jours on me dit qu’il faut que j’attende et que l’on va me rappeller. Jusqu’à la semaine dernière où, totalement par surprise, je reçois par la poste une nouvelle freebox. Ils ne m’ont toujours pas demandé de rembourser celle qui a disparu, donc je fais comme si de rien n’était (ça vaut quand même 300 €) et pour le moment tout est rentré dans l’ordre…

Sinon quoi de neuf dans ma vie ? Un nouvel appart dans lequel je respire enfin et qui ressemble plus à une petite maison que mes anciens 12 m². Je m’y sens vraiment bien avec Gigi (nouveau petit nom de Gin). On y passe des soirées géniales, juste à être là, ensemble. Sinon j’ai recommencé à bosser sur Le Chevalier Errant. Il faut relancer la machine, parce que là, après trois mois d’inactivité, j’avoue être un peu rouillé. Plus j’avance, plus je sens un bouillonnement en moi qui me rapproche inéluctablement vers le film. Je veux le faire, à tout prix mais je ne sais pas comment, avec quel argent, quelle équipe etc… Je me sens au début du processus de création mais en même temps complètement immergé dedans un film dont chaque plan existe déjà. Virgin se passe toujours aussi bien, aussi tranquilement même si je commence un peu trop à sentir que ça me mange trop de temps et d’énérgie. L’idéal serait de revenir à mi-temps mais je sais que c’est impossible. On verra aussi ce que je fais de cet élément de ma vie, comment je le transforme en « autre chose ». La seule vraie nouveauté, c’est sans doute Mathieu, mon fidèle compagnon qui m’a proposé d’être un intervenant dans son collège, dans le cadre d’un atelier vidéo. Je serais le « professionnel » qui vient offrir son savoir aux petits jeunes avides d’apprendre. Ca peut être franchement fun et enrichissant. Bon il faut que je le fasse pendant mes jours de congés et c’est loin de Paris mais je me dis que je ne peux pas refuser cette opportunité.

Voilà. Ceci est juste un message de reprise. Un rattrapage grossier et basiquement exhaustif de ce trou noir qu’à été l’été. Je reviens très vite avec plus de matière !

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